Quant aux citations de Maître Yoda, il lui suffit d’être très mauvais en syntaxe et calé en conditionnel pour les faire passer pour Paroles d’Evangile. Essayez, vous verrez.
La nouvelle est tombée ce 31 octobre, et comme par une ironie du sort, nous étions à quelques heures d’Halloween, fête des morts, placard joyeux d’horreurs et de « tricks or treack » braillés par des mômes en costumes criards. La nouvelle est tombée dans un élan joyeusement implacable : « Star Wars a été racheté par Disney, un 7ème épisode sera le fruit de cette fameuse OPA. » Et merde ! La journée commençait pourtant bien. Demain, c’était jour férié, le dernier Tim Burton sortait dans les salles, la météo parisienne était même acceptable pour une veille de novembre. Et voilà que Dark Vador & co ont décidé de pourrir mon groove. I’m your father, baby, yeah !
Parmi les handicaps de la vie sociale, ne pas aimer « Star Wars » fait partie des maladies honteuses que l’on cache avec le plus de brio possible. Je ne compterai pas le nombre de sourire faux-cul que j’ai fait dans ma jeunesse quand on me demandait : « Star Wars, c’est LA saga culte de tous les temps, pas vrai ?!« . Désespérée, je grimaçais une fois le dos tourné en me demandant : « Foutre Diable, qu’ont-ils tous avec Star Wars ?!!« . La contamination était partout : les soirées déguisées emplies de neuneus en peignoirs blancs et sabres clignotants, de crétins en casque de moto et cape de fortune au souffle rauque dans votre nuque murmurant « Je suis ton père…« , dans les soirées vidéo entre copains, dans les conversations : on en revenait toujours à « Star Wars ». L’épidémie d’imbécilité ambiante atteignit son comble lorsque le prequel de la trilogie des années 80 sortit version 2000.
Un « Star Wars » roulé comme un soap intergalactique expliquant le pourquoi du comment, la pauvre Nathalie Portman maquillée à la truelle par une geisha sans doute bourrée au saké, son amoureux transis, un ado boutonneux ayant le charisme d’une tuile. Pas de pot, c’était aussi un triptyque à se taper entre amis, religieusement assis dans la salle de cinéma, pop-corn prêts à dégainer sur des bouches béates de stupeur.

Je n’ai jamais compris l’intrigue de « Star Wars », ni cherché à en résoudre ses mystères. Dark Vador était juste pour moi un aspirateur plus sophistiqué que les autres, un Dyson asthmatique capable d’ânonner uniquement « Je suis ton pèèèèèère…« , mais sans la grâce du phrasé de Proust, autre asthmatique notoire. D’ailleurs je me demande bien quelle tête aurait fait Marcel s’il avait assisté à cet emballement collectif. L’intrigue politiquement tordue ne m’a toujours pas fait distinguer les Sith de la planète Naboo, je ne différencie pas vraiment Han Solo d’Obi Wan Kenobi et, la trentaine bien tassée, je confonds toujours « Padawan » avec le « Papadum », galette indienne de lentilles fritte. Pire : je n’ai jamais esquivé la moindre admiration pour le physique de la Princesse Leia affublée de ces grotesques macarons momifiés, ni rêvé de la luciole géante faisant office d’épée et accessoirement veilleuse à mouflet. Quant au « côté obscur de la force« … eh ben, quoi ? C’est l’jeu ma pauv’ Lucette !


Le seul personnage qui trouve vaguement grâce à mes yeux, c’est Yoda. Un bon petit vieux ressemblant à un batracien sous lexomil nippé du gilet tricoté par Thérèse du « Père Noël est une ordure« . Attention, je n’adhère pas pour autant aux citations artificiello-prophétiques du Maître. Il lui suffit d’être très mauvais en syntaxe et calé en conditionnel pour les faire passer pour Paroles d’Evangile. Essayez, vous verrez, vous serez deux fois plus écouté. Même si vous lancez un conseil aussi inutile que » Quand tu regardes vers le Côté Obscur, faire attention tu dois… » ou plus encore plus foireux : « N’essaie pas. Fais-le. Ou ne le fais pas. » Avec ça, Luke Skywalker était bien renseigné !

Ne pas aimer « Star Wars » en ces temps-là était une tare à dissimuler à tout prix derrière un enthousiasme convenu, sous peine d’être exclu de bons nombres de manifestations sociales. Y avait pas à tortiller du Jedi : tout le monde aimait « Star Wars ». Cette vérité était universelle. Quel désespoir de ne pas pouvoir hurler au mégaphone que je trouvais que le scénario était foutraque, que Princesse Leia n’avait pas de quoi fouetter un chat, que les véhicules volants ne faisaient pas rêver et que l’idée d’un futur extraterrestre passé en combinaison vinyle était un de mes pires cauchemars…
La maturité arrivant, je peux enfin confesser cette aversion sans honte à mon entourage. Murmurée à l’oreille comme on nomme une maladie vénérienne, désormais je risque : « Tu sais, je n’ai jamais aimé Star Wars… » et d’entendre alors pleine de contentement : « Oh, vraiment ?! Moi non plus… ».
PS : je demande pardon à certains de mes amis dont je connais l’engouement pour cette saga…Je précise que cet article n’est aucunement une attaque personnelle.
Bonjour,
Bien que j’aime particulièrement cette saga, il se trouve que j’ai adoré votre article ! Celui-là même qui m’a fait découvrir votre site.
Chaque article est un moment de détente malgré mes lacunes dans certains domaines, qui m’obligent à faire des recherches pour comprendre certaines de vos références.
Un grand merci donc, pour ces lectures savoureuses !